L'écailler
du Galuchat

 
Encyclopédie de
tous les savoirs

 
Humour
en dessins

 
Les pages
"cons"

 
Les sujets qui fâchent

 
Le courrier
du coeur

 
LE GALUCHAT
MADAME

 
Littératueurs
d'humour

 
Consommation

 
Nous et Vous :
Forum, archives, etc.

 © Tous les textes et les dessins appartiennent à leurs auteurs ne pas s'en servir sans permission manuscrite (pour la plupart ils cherchent du boulot, pensez à eux, écrivez-nous)

Fallait pas la faire boire

J’ai deux voisins adorables : 91 ans pour lui, 90 tout rond (c’est le cas de le dire, vous allez comprendre) pour elle. Cultivés, simples, généreux, intelligents, ouverts. Sans me faire tomber dans la gérontophilie, ils me réconcilieraient presque avec la vieillesse.

Moi vous me connaissez ? Dans mon trou perdu, les soirées d’hiver sont parfois longues. J’ai donc eu la bonne idée hier soir de convier mes deux nonagénaires de voisins à une champagne-partie apéritive.

Laissez-moi dénoncer avec la dernière énergie cette insupportable dérive de notre société consistant à prendre les gens pour des irresponsables, tout en accélérant cette détestable tendance à chercher des responsables à toutes les misères du monde. Sublime paradoxe. La canicule tue 10 000 vieux ? Allez, faites sauter un ministre. Ce pauvre Mattei, ni meilleur ni pire qu’un autre, là n’est pas le débat, qu’y pouvait-il, si les vieux tombaient comme des mouches ? Tu glisses sur une feuille morte ? Assigne ton maire en justice parce que les trottoirs ne sont pas dégagés. Plus de fatalité, plus de destin : des coupables. On veut des coupables. Allez-vous faire foutre !

Le misanthrope responsable que je crois être a la faiblesse de penser qu’il a toujours en face de lui des gens responsables.

Mémé, si tu t’es pété la gueule au champagne chez moi hier soir, c’est bien parce que tu l’as voulu. Pour autant que je sache, personne ne t’a fourré un entonnoir dans le clapoir pour te forcer à avaler mon « Bruinard Grand Siècle » bien frappé. Je n’aurais jamais laissé faire une chose pareille ! Mais tant que tu en redemanderas dans la limite des stocks disponibles, je t’en servirai. De quel droit le trou du cul que je suis pourrait-il se permettre de te dire : « Tu as assez bu grand-mère, on va passer à table » ?

Vous l’aurez donc compris : Ma chère voisine a un peu abusé de la dive amphore, malgré les invitations à la prudence qui devinrent au fil de la soirée de ferventes admonestations, proférées par son camarade de plumard. En tant qu’hôte, je considère que mon rôle consistait à veiller à ce que mes invités ne manquent de rien. Pas à les priver.

J’ai eu la très mauvaise idée ensuite, de manière imprévue, de proposer une poêlée de St jacques sur une fondue de poireaux, pensant ainsi que ces mets plus consistants permettraient d’éponger un peu le champagne. Raisonnement fatal car ces agapes improvisées ont permis à Mémé d’entretenir magistralement voire amplifier sa biture à grand renfort de Condrieu. C’est vrai qu’il était bon.

Inutile de vous préciser que selon la formule consacrée, il y avait du vent dans les voiles quand ma chère nonagénaire a regagné ses pénates.

Je passerai rapidement sur l’engueulade avec ma moitié parce que « j’avais trop fait boire Mémé ».

Fuck, Fuck et Fuck !

Je n’ai fait boire personne. Si les gens ne savent pas se tenir et même si tout simplement ils ont envie d’en ramasser une, c’est leur problème, pas le mien. A quatre-vingt dix piges, peut-être qu’elle se dit : « Après moi, le déluge » ?

Putain, elle aurait drôlement raison, Mémé !

Bon courage à tous. Et ne buvez pas trop !!!

© Jean Menchassech